“Avec ou sans cookie tiers, nous conserverons le capping et la répétition” (itw D. Levy, Skaze)

“Avec ou sans cookie tiers, nous conserverons le capping et la répétition” (itw D. Levy, Skaze)

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Si le sujet de la fin des cookies interpelle autant les acteurs de la publicité digitale, c’est parce qu’il concerne l’ensemble de l’industrie et remet en question un modèle qui fait foi depuis ses débuts. C’est aussi parce qu’il représente un défi : celui de recréer des méthodes de ciblage et d’identification inédites, pour tenter d’être en phase avec la nouvelle ère qui se dessine, tout en sauvegardant l’efficacité et la performance des campagnes. Skaze, trading desk omnicanal 100 % user centric, est plutôt bien positionné pour répondre à nos interrogations sur le sujet. Depuis 2016, l’entreprise accompagne les annonceurs dans l’activation des leviers pour répondre à leurs problématiques d’acquisition et de fidélisation client online.

Afin d’aider ses clients à multiplier les points de contacts de manière intelligente jusqu’à la transformation, Skaze, qui tient à souligner son positionnement de multi- méta-DSP, utilise une approche technologique exhaustive. Elle s’appuie notamment sur des technologies tierces (DV 360, The Trade Desk, Displayce, etc.) ainsi que sur ses technologies propriétaires : un tag container, un data lake pour la récupération des cookies et des empreintes digitales permettant l’identification des utilisateurs, une Customer Data Platfom pour l’unification et le scoring des profils, et un outil de Dynamic Creative Optimization. Au cours d’une discussion avec David Levy, CEO & Founder de l’entreprise, nous avons cherché à savoir comment cette société de 20 personnes, en forte croissance (+150 % en 2018 et +60 % en 2019), qui évolue dans un environnement hyper-technologique, envisage l’avenir au sein d’un nouvel écosystème sans cookie tiers.

Alors que la CNIL a publié son projet de recommandation sur les modalités du consentement, Google a annoncé vouloir bloquer les cookies tiers sur son navigateur Chrome. Quel impact auront selon vous ces mesures sur l’écosystème ?

Les recommandations de la CNIL s’inscrivent dans la logique du RGPD. Il s’agit de bonnes pratiques soumises à l’appréciation du juge en dernier recours. La décision de Google quant à elle tient évidemment compte du RGPD et s’adapte à ces best practices. Aujourd’hui, l’impact de la Privacy Sandbox de Google n’est pas mesurable car nous sommes aux prémices de sa mise en place et le type de données collectées, partagées et échangées dans ce nouveau cadre ne seront connues que courant 2021. Toutefois, le défi relève plus de la centralisation des données que de la restriction des cookies en elle-même.

Le défi majeur est en effet de réussir à centraliser intelligemment les informations communiquées par l’ensemble des acteurs avec lesquels un annonceur est en contact tout au long de la chaîne programmatique. En tant que trading desk indépendant omnicanal, Skaze dispose d’un rôle privilégié dans ce contexte : la centralisation de l’ensemble des informations est réalisée au sein de notre Customer Data Platform (entièrement développée en interne). Les données sont recueillies dans les règles d’un consentement exprimé auprès de chacun des acteurs concernés.

Certes, le cookie est officiellement amené à disparaître mais il est avant tout en passe de muter pour devenir un élément un peu moins obsolète tout en respectant la vie privée des internautes, ceci grâce aux ID de connexion.

Aviez-vous pressenti cette transformation ?

Nous avons en effet observé une bascule de la collecte des cookies très rapidement. Ils ont diminué de façon importante ces dernières années : de plus de 75 % en 2016, puis de 40% en 2018, en sachant que cette décroissance se poursuit pour tendre in fine vers 0. Par conséquent, nous avons anticipé les annonces en mettant à profit l’ensemble des données au sein d’un data lake, dans le but de déterminer les modèles possibles et d’assurer une identification fiable de l’internaute. Progressivement, nous utilisons les cookies comme un étalon pour mesurer l’efficacité de nos techniques d’identification.

Désormais, l’enjeu est de réconcilier l’ensemble des identifiants en interne. L’avantage est que notre position de trading desk indépendant multi-méta DSP nous donne une vision d’ensemble sur la data. C’est d’ailleurs un argument de taille pour nos clients auxquels nous offrons un accompagnement poussé tant en termes de suivi (présence chez le client, calls et reportings réguliers), que de recommandation. Nous disposons en outre d’un studio créatif qui développe la totalité des créations (bannières, emails, landing pages, etc.) afin de leur offrir un service à valeur ajoutée. Ainsi, nos clients, qui établissent souvent de grosses stratégies marketing, peuvent davantage se concentrer sur les investissements média et la data (consultable via la CDP).

Comment recréer de la valeur dans un monde sans cookie ? Avec quels standards l’industrie va-t-elle pouvoir travailler pour cibler la publicité ?

L’industrie cherche le Graal : un identifiant cookie-less et non dépendant aux GAFA. Pour Skaze, l’important est de s’adapter avec souplesse aux évolutions du marché. Les annonceurs nous confient justement leur budget sur le long terme avec pour objectif de s’adapter à un environnement complexe et changeant, en maîtrisant les budgets et les résultats quelles que soient les contraintes. A ce jour, des solutions telles que l’advertising ID consortium ou l’offre d’ID5 apportent des solutions pour passer à la nouvelle étape. De notre côté, nous nous appuyons sur notre partenaire The Trade Desk qui nous abreuve d’informations et nous accompagne dans le cadre de la récupération de leurs data, pour alimenter notre CDP via des connexions API.

Sur quoi pourrait prochainement reposer l’identité des internautes ?

Des solutions concrètes permettent aujourd’hui aux annonceurs de tirer parti des innovations du marché tout en minimisant leur dépendance aux GAFA. On entrevoit différents types d’identifiants selon les acteurs, tous réunis en temps réel ou en asynchrone, gérés annonceur par annonceur en tenant compte des recommandations de la CNIL et du RGPD. Bien qu’il ne s’agisse pas de trouver l’ID unique parfait tant fantasmé par le marché, ceci est en revanche en accord avec nos objectifs et la qualité de service que nous souhaitons délivrer aux annonceurs dans les prochaines années. 

David Lévy, Skaze

Faut-il s’attendre à voir fleurir les alliances autour d’un ID unique ?

Oui, cela me semble cohérent. Aujourd’hui, lorsque l’on travaille avec 5 ou 10 DSP, on peut se rendre compte que les sites qui remontent sont quasiment toujours les mêmes. Le contraste avec le début des années 2000 (où des dizaines de milliers de sites entraient en jeu) est flagrant. Certains grands carrefours d’audience très connus sont en effet exploitables dans n’importe quelle industrie. On constate également que la PQR ainsi que la blogosphère (un peu moins présente en programmatique) occupent une place grandissante. Sans avoir de boule de cristal, les alliances autour d’un ID unique vont croître, ce qui devrait faire la part belle aussi bien aux éditeurs qu’aux fournisseurs de contenu et leur permettrait d’être moins tributaires des GAFA.

La fin des cookies tiers aura-t-il un impact sur la navigation de l’internaute et sur son rapport à la publicité ?

L’activité des internautes qui repose entre autres sur la consultation des news, les interactions sur des forums ou la sauvegarde de leurs préférences, est liée aux cookies 1st party et non aux cookies tiers. L’impact pour la navigation de l’utilisateur sera moindre. Le rapport de l’internaute à la publicité restera selon moi paradoxal : l’utilisateur ne veut pas voir de publicité mais interagit avec dès lors qu’elle est pertinente. L’impact réel de ce nouveau contexte concerne davantage le niveau de pertinence des annonces. A mon sens, l’avenir de la publicité repose toujours et plus que jamais sur la pertinence des algorithmes de recommandation car ce sont eux qui conditionnent l’exposition d’un internaute au message d’un annonceur, à un moment T.

La publicité contextuelle est pressentie comme la solution la plus viable à l’ètre cookieless. Est-ce une forme de publicité que pratiquez déjà chez Skaze ?

Nous déployons en effet beaucoup d’annonces contextuelles dans le cadre de nos collaborations avec des acteurs tels que Verizon (qui donne accès à la galaxie Microsoft). Ce partenariat nous permet d’exploiter la sémantique sur les moteurs de recherche de cette galaxie et d’analyser notamment les boîtes mail pour cibler les utilisateurs. Les mails reçus par un internaute permettent en effet aisément de déterminer le profil d’un utilisateur.

Prenons l’exemple d’un utilisateur adhérent de la Fédération Française de Golf qui est abonné à leur newsletter hebdomadaire et reçoit un mail de confirmation pour l’achat d’un club de golf. Il assez évident qu’il entre dans la cible d’un voyagiste qui fait la promotion d’un hôtel golf en Algarve. Cette technique est donc très pertinente. Nous avons également rencontré le DSP Qwarry, spécialiste de publicité contextuelle qui analyse l’univers sémantique des pages pour le ciblage des utilisateurs (sans cookie).

Certaines questions s’imposent : l’engouement autour de ces solutions est-il lié à un effet de mode ? Comment ces acteurs vont-ils avancer et quel reach vont-ils permettre de générer ? Il faut laisser le temps au temps, pour cela nous avons deux ans devant nous.

Ce nouveau contexte pourrait renforcer une fois de plus la domination des GAFA. Faut-il réellement craindre d’importantes pertes de revenus pour les éditeurs ?

Oui, et ceci touche l’ensemble des secteurs. Les GAFA ont d’ores et déjà fait disparaître quelques milliers d’éditeurs. Au début des années 2000, ils se comptaient en dizaine de milliers alors qu’aujourd’hui, les éditeurs connectés aux principaux DSP représentent un top 1000. En revanche, le marché dispose encore d’une marge de manœuvre pour développer des innovations face aux GAFA.

La future tendance de fond pour les éditeurs est d’identifier les utilisateurs, non plus par le biais d’une captation de l’audience mais via un ID personnel permettant de consolider leur connaissance de l’internaute. En tant que trading desk omnicanal qui a développé ses propres outils cookie-less, Skaze se trouve dans une position privilégiée pour participer aux conversations qui feront avancer l’industrie dans la mise en place d’une nouvelle forme d’identification et de consortiums d’éditeurs.

Comment Skaze compte aider ses clients annonceurs à mener des campagnes performantes dans le nouveau contexte à venir ?

Grâce à la scénarisation des campagnes. Nous avons analysé toutes les propositions technologiques du marché et sommes arrivés à une conclusion déjà pointée par de nombreux acteurs : « les visuels sont les parents pauvres du programmatique ». Aujourd’hui les algorithmes des DSP optimisent déjà avec efficience le prix à payer pour la bonne enchère, au bon moment, diffusée au bon internaute. Mais rien n’est fait pour maîtriser le message diffusé. La DCO que Skaze a développée en interne est le premier pas vers la résolution du problème. Nous avons choisi de le résoudre de manière très chirurgicale : au lieu de diffuser un jeu de 2, 3, 5 ou 10 visuels, nous en générons des milliers à la volée selon des scénarios (promesse de la marque, promesse de la campagne, etc.) qui s’appuient sur l’intelligence artificielle.

Ces scénarios, qui entrent en scène dès le premier point de contact, sont testés au sein de populations statistiques proches afin de définir les stratégies les plus efficaces et de diffuser le meilleur discours tout au long de la campagne. Ainsi nous écartons de nos méthodes les pratiques de certains retargeters qui martèlent les internautes avec le même message après conversion et qui oppressent ainsi le consommateur avec une publicité non pertinente.

Comment comptez-vous gérer le frequency capping et la répétition ?

Nous travaillons en effet avec des acteurs très ROIstes et notre business model repose sur l’achat/vente au CPM. Ce qui va permettre d’engager l’utilisateur, c’est avant tout la pertinence de l’offre, du contenu du message et des formes qu’il prend. Une fois la première interaction avec la campagne réalisée, nous faisons entrer l’utilisateur dans une boucle de retargeting avec un capping de 5 répétitions maximum sur toute la durée de la campagne. Ce qui va permettre d’optimiser ce capping c’est l’univers dans lequel est sollicité l’utilisateur, la qualité des visuels et la scénarisation. Avec ou sans cookie, nous conserverons le capping et la répétition qui restent essentiels pour nous.

Propos recueillis par Stéphanie Silo

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